Une renaissance

On dit que le hasard fait parfois bien les choses. Pour moi le hasard a
fait que je tombe sur un article. "Tous hypersensibles?"... Curieuse, il
a suffit d'un clic pour que tous les points d'interrogation qui se
bousculaient dans mon esprit, sautent les uns après les autres.

Les mots défilaient sous mes yeux, qui se remplissaient peu à peu de
larmes de soulagement. Les phrases me sautaient au visage. A 32 ans, je
pouvais enfin mettre un mot sur mon moi profond. Une véritable libération!

J'ai toujours été une éponge émotionnelle. J'absorbe, je bois, je
m'approprie les peines et les joies des autres. Je les vis comme si
elles étaient miennes. Je ressens tout, je ressens trop. J'analyse
énormément et constamment. Et bien souvent, j'endosse le rôle de la
confidente, de la psychologue, qui veut aider l'autre, le conseiller et
lui permettre d'avoir une nouvelle vision des choses, d'atteindre la
sérénité... bref je donne énormément de moi pour faire le bien autour de
moi.

Néanmoins, si le temps et l'énergie que j'emploie à aider les autres ne
changent rien du tout, si leur négativité persiste, et me pollue
l'esprit, j'explose, je fuis, je les abandonne. A forte dose, les
souffrances des autres deviennent mes souffrances et je perds pieds. Je
n'ai donc pas d'autres choix que de mettre une barrière émotionnelle
entre elles et moi.

Je suis sensible à ce qui m'entoure. L'expression sur un visage, les
vêtements, les mains, le regard, la relation entre un père, une mère et
son enfant, l'ambiance qui règne dans une pièce... tout cela me sautent
au visage et me touchent le coeur. Je peux ressentir la fatigue des
gens, leur désespoir, deviner leur quotidien difficile, leur hostilité,
admirer leur insouciance, leur assurance, ressentir l'amour qu'ils ont
envie de partager, percevoir le manque qui peut se cacher derrière un
mot glissé rapidement au détour d'une conversation... je capte tout et
tout le temps.

Je m'émerveille souvent face à de toutes petites choses ou à des scènes
de vie totalement banales. Je prends le bonheur dans les petits détails.

Je ne supporte pas les critiques qui me semblent injustes. Je suis d'une
grande susceptibilité. Je sais me remettre en question et le fais sans
arrêt, j'accepte donc les remarques, mais tout dépend comment elles sont
formulées. Ma susceptibilité peut provoquer chez moi des réactions très
vives, des colères soudaines, souvent perçues comme exagérées. Dans ces
moments là, je me sens totalement incomprises et me replis sur moi même.

A l'origine très timide, je suis maintenant plus sociable mais je manque
toujours de confiance en moi. J'accorde trop d'importance au regard des
autres sur moi. J'ai peur des regards qui jugent, et qui se moquent,
j'ai peur de ne pas être assez bien.

Je réfléchis beaucoup, tout le temps. Mon cerveau ne se repose jamais,
notamment la nuit. Je "ressasse" énormément...des pensées parasites que
j'essaye de supprimer avec le temps. Une critique que l'on ma faite il y
a des jours, des semaines, des mois et parfois des années, peut
ressurgir et me contrarier. L'émotion que j'ai ressenti à l'époque
ressurgit alors...à l'inverse, un souvenir heureux, de douces paroles,
l'expression d'un visage que j'ai aimé, peuvent aussi me revenir et
provoquer en moi une immense joie.

Je rêve beaucoup, je rêve tout le temps, pour oublier le quotidien,
tromper l'ennui, apaiser mon esprit, vivre la vie que je n'ai pas.

Je dessine, j'écris pour libérer ce trop plein d'imagination qui
bouillonne au fond de moi et que j'aime laisser exploser.

La musique est nécessaire à ma vie. Elle est directement connectée à mes
humeurs.

Mes sens sont parfois un peu trop développés. L'étiquette d'un vêtement
qui frotte sur ma peau peut très vite m'agacer. Une caresse trop
répétitive dans le dos, va me faire mal et m'énerver. Le bruit d'une
fourchette dans l'assiette ou pire, contre les dents, va me donner des
frissons insupportables et me mettre dans une colère noire si on le fait
exprès. Je sursaute facilement et souvent. Je suis très sensible aux
fortes lumières, et l'enchaînement rapide de certaines images au cinéma,
peut me perturber. Je suis sensible aux odeurs, bonnes ou mauvaises. Et
celles qui sont bonnes mais associées à de mauvais souvenirs, peuvent me
donner la nausée.

J'ai besoin d'amour. J'aime aimé, et être aimée. Et si l'on s'attaque à
moi et que ce n'est pas justifié, cela me plonge dans une profonde
tristesse. Je ne comprends pas l'injustice et la méchanceté. Je suis
apparemment "trop gentille", un défaut que j'ai du mal à corriger.

Mon intuition ne me trompe presque jamais. Je ressens certaines choses,
je les vois arriver.

Je ne trouve aucun bonheur dans la routine professionnelle. J'ai besoin
d'évoluer, d'apprendre. L'idée de changer de métier me trotte toujours
dans la tête, et j'ai d'ailleurs déjà osé tout plaqué. Néanmoins, je ne
comprends pas pourquoi je ne trouve pas ma voie, ou me dis que je me
suis tout simplement trompée de chemin. Dès que j'ai fait le tour d'un
métier, et qu'il ne m'apporte plus aucune joie, je m'ennuie et je
déprime. J'aimerais vivre de ma passion, mais personne ne me comprend.

Aujourd'hui je sais pourquoi je suis comme je suis et surtout je sais
que je ne suis pas seule :-) C'est un véritable réconfort de lire tous
ces témoignages.

L'hypersensibilité a souvent été source de déprime et d'anxiété, mais
elle a aussi été source de grands bonheurs. J'aime plus, j'ai plus de
plaisir, je ressens la joie avec plus d'intensité et je bénis chaque
petits bonheur que la vie ma donné. Certes, tout est plus fort, plus
fou, plus tout, tout est trop! Mais maintenant que je sais pourquoi je
suis comme je suis, je compte bien revivre ma vie! A mon niveau,
l'hypersensibilité n'est pas invivable, juste ingérable parfois. J'ai
donc décidé de la considérer comme un don que je dois à présent
maîtriser pour être heureuse :-)